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TANGERINE

Sean BAKER - USA 2015 1h28mn VOSTF - avec Kiki Kitana Rodriguez, Mya Taylor, Karren Karagulian... Scénario de Sean Baker et Chris Bergoch. PRIX DU JURY, FESTIVAL DU CINÉMA AMÉRICAIN DE DEAUVILLE 2015.

Du 04/09/24 au 22/09/24

TANGERINEC'est la veille de Noël – comme dans La Vie est belle, de Frank Capra. Dans un café à donuts tout près d'Hollywood, Sin-Dee Rella (Kitana Kiki Rodriguez) et Alexandra (Mya Taylor) ont investi toutes leurs économies dans un unique beignet, pour célébrer la sortie de prison de la première. A travers la vitre, la ville brille d'une lumière orange, les deux femmes sont un instant enveloppées dans la béatitude des retrouvailles et de la sucrerie.
Ce paradis instantané s'écroule au moment où Alex révèle à Sin-Dee que, pendant son séjour en prison, Chester, son jules, l'a trompée avec une autre, « avec un vagin et tout ». C'est le moment de préciser que les amies ont pour lot commun d'être afro-américaines et transgenre, et de gagner leur vie sur les trottoirs de West Hollywood. Saisie d'une légitime fureur, Sin-Dee décide de se faire justice, entraînant à sa suite Alex, qui espère modérer le courroux de son amie.

En général, lorsqu'il faut accomplir une vengeance à Los Angeles, on brûle du pétrole, on vide des chargeurs. Mais, on l'a déjà dit, les héroïnes de Tangerine sont pauvres comme Job, et la quête frénétique que met en scène Sean Baker se fera à pied et en transports en commun, dans des recoins de la métropole californienne que le cinéma a généralement ignorés. Tangerine relève donc de l'un des genres les plus anciens du cinéma : la course-poursuite burlesque. S'enquérant à chaque coin de rue de l'endroit où elle pourrait trouver celui et celle qui l'ont trompée, Sin-Dee est une furie qui dévaste une chambre de motel transformée en maison de passe, sème la terreur à El Gran Burrito, se calmant à peine lorsqu'il s'agit d'accompagner Alex qui doit chanter dans un restaurant de hamburgers.
La dynamique entre les deux personnages fournit au film une énergie formidable. Perpétuellement au bord de la crise de nerfs (Almodovar l'aurait sans doute accueillie avec joie dans l'un de ses premiers longs-métrages), Sin-Dee est en même temps la plus réaliste des deux héroïnes. Sous ses dehors sereins et altiers, Alex est une rêveuse, et la séquence qui la montre chantant devant une salle quasi vide forme une bulle de mélancolie dans ce film débordant d'énergie. Kiki Rodriguez et Mya Taylor font ici leurs débuts à l'écran et – quelle que soit la distance qui les sépare de leurs personnages – elles affirment une présence, une personnalité avec une autorité que leur envieront bien d'autres aspirants acteurs de la région.

Sean Baker a tourné sans film, sans caméras, utilisant plutôt des téléphones, des iPhone 5S pour être précis. Il s'explique, par ailleurs, des raisons – esthétiques, économiques – de ce choix. Le résultat est en tout cas spectaculaire. Si les appareils peinent encore à saisir dans leur fluidité les mouvements rapides, ils autorisent une formidable intimité avec les acteurs, et donc entre les personnages et les spectateurs.
Or, il se trouve que l'immense majorité des spectateurs de Tangerine (qui a connu un joli succès aux Etats-Unis) ne partagent pratiquement rien de l'expérience quotidienne d'Alex et de Sin-Dee. En plus du talent des interprètes, le mode de tournage permet de saisir des expressions fugitives, des éclairs de lassitude, des moments d'abandon, qu'un dispositif plus lourd – caméras visibles, éclairage artificiel – aurait peut-être escamotés…

(T. Sotinel, Le Monde)