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Et voilà, Vidéo en Poche c’est fini, le compteur s’arrête à 30237 copies vendues sans DRM sur clés USB ! À bientôt dans le cyberespace indépendant et surtout IRL dans les salles de cinéma :)Le 30 novembre à minuit, Vidéo en Poche a tiré sa révérence et retourne dans sa bouteille de ...

Stop Bolloré ! L'appel du collectif
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Ici sont archivées les publications du quiz des “trente dernières secondes” du n°101 au n°117   Samedi 17 avril Hier, fin N° 101. Juliette Binoche, 30 ans plus tard, et magnifique, dans un autre de ses plus beaux rôles. La musique, c’est le célébrissime Canon en ré majeur de Johann Pa...

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BONA

Réalisé par Lino BROCKA - Philippines 1980 1h27mn VOSTF - avec Nora Aunor, Phillip Salvador, Marissa Delgado, Raquel Monteza... Scénario de Cenen Ramones.

Du 25/09/24 au 07/10/24

BONALe film s’ouvre sur une spectaculaire scène de procession dans les rues de Manille où des centaines de milliers de corps s’entrechoquent dans une même hystérie collective. Au milieu de cette foule grouillante, majoritairement composée d’hommes, apparaît le visage de Bona, au regard grave et déterminé.
Bona est une jeune femme issue des classes moyennes de Manille. Différente des autres filles de son quartier, elle préfère flâner dans les rues et fréquenter les cinémas que d’aller au lycée. Elle voue une admiration sans bornes à Gardo, un acteur de seconde zone qui joue de petits rôles dans des séries Z et autres films d’action très en vogue dans la capitale des Philippines des années 70. Alors tous les jours, elle se rend sur les plateaux de tournage pour le voir et l’admirer comme une groupie.
Une adoration qui pousse Bona à décider de quitter l’école, finissant ainsi d’exaspérer son père, qui la chasse du foyer. Ne doutant de rien, elle s’installe chez Gardo, au cœur des quartiers pauvres et populaires de Manille, afin d’être au plus près de son idole.

Mais alors qu’elle espérait naïvement pouvoir vivre une histoire d’amour avec lui, elle devient rapidement sa bonne à tout faire. Tous les jours, Bona doit aller chercher de l’eau pour que Gardo puisse prendre des bains, elle frotte son dos, récure son carrelage, recoud ses vêtements et cuisine pour lui, tout en supportant la présence des multiples conquêtes féminines qu’il ramène tous les soirs. Une fois et une seule, il s’introduit dans le lit de Bona, mais le lendemain matin, l’affaire semble lui avoir échappé. Goujat, narcissique et gigolo quand le besoin s’en ressent, Gardo profite ainsi sans scrupule de l’idolâtrie de Bona, qui refuse d’admettre que l’homme dont elle s’est entichée est d’une rare médiocrité et ne s’intéresse aucunement à elle.

À partir de cette intrigue, le réalisateur Lino Brocka tisse sa narration d’une main de maître, glissant progressivement de la légèreté à la gravité, dévoilant par petites touches la profondeur de sa réflexion. Au détour de deux scènes consécutives, une fête de mariage traditionnelle puis un passage en boîte de nuit dévoilant l’influence de la culture pop mondialisée sur la jeunesse de Manille, on comprend que ce qui se joue n’est pas tant le rapport toxique entre ces deux êtres que la condition de la femme philippine dans son ensemble. En effet, le choix de montrer comme protagoniste un être ambivalent, refusant une destinée familiale toute tracée, soumise aux différentes sphères d’influence traditionnelles (père et frère aîné autoritaires, mariage arrangé ou forcé), donne au film toute sa pertinence et sa modernité quant à la condition féminine. Par sa volonté de s’en sortir en dépit des obstacles qui se dressent devant elle, Bona incarne l’indépendance de celle qui veut choisir sa vie et ses rêves… même brisés.

Présenté à la Quinzaine des Réalisateurs de Cannes en 1981, ce film du grand cinéaste philippin Lino Brocka n’a jamais connu de sortie en France, et il est demeuré invisible pendant quatre décennies jusqu’à sa récente restauration. Comme dans Insiang ou Manille, le réalisateur excelle à ancrer ce mélodrame dans un contexte social bien réel (la vie quotidienne dans un bidonville filmée en quasi huis clos) tout en évitant l’écueil du misérabilisme, et il réussit, derrière les conventions du genre, à développer une critique des mœurs de la société philippine. Mais le film ne serait rien sans l’interprétation solaire de l’actrice Nora Aunor, première comédienne philippine à accéder au rang de superstar, vénérée par les classes populaires dont elle est issue, et productrice du film, qui crève littéralement l’écran en petite sœur d’Adèle H, (presque) totalement aveuglée par cet amour sans retour.