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DAHOMEY

Écrit et réalisé par Mati DIOP - Benin / Sénégal / France 2024 1h08mn VOSTF - Ours d’Or - Festival de Berlin 2024.

Du 11/09/24 au 01/10/24

DAHOMEYC’est une longue histoire qui est à l’origine de ce film brillant et envoûtant. Tout commence à la toute fin du XIXe siècle, celui de la révolution industrielle, de la montée en puissance de la bourgeoisie capitaliste qui s’est enrichie sur l’essor des empires coloniaux. Justement en 1895, sous un prétexte fallacieux, l’armée française envahit un des derniers grands royaumes africains, le Dahomey, territoire qui correspond à une partie de l’actuel Bénin. Au cours de cette opération guerrière, un grand nombre de statues et d’objets rituels sont pillés et sont intégrés aux collections du Musée d’Ethnographie du Trocadéro, aujourd’hui Musée de l’Homme – en 2000, c’est le musée du Quai Branly qui récupérera les œuvres.

À l’indépendance du Dahomey en 1960, la France, contrairement à ses voisins – l’Angleterre d’Élisabeth II organise des restitutions dès la fin des années 1950, la Belgique rend différents objets au Congo dans les années 1970 – garde pour elle son butin de 1895. Il y aura pourtant un rapport favorable à la restitution, écrit en 1982 par un directeur du Louvre, mais il restera lettre morte (comme quoi Mitterrand avait gardé certains réflexes néocoloniaux de ses années de ministre de la IVe République). Aussi, quand – miracle inespéré – Emmanuel Macron annonce en 2018 être en faveur de la restitution des objets au Bénin, la réalisatrice franco-sénégalaise Mati Diop (Grand Prix à Cannes pour son film Atlantique) veut absolument filmer ce moment. Pour elle, issue d’une famille illustre par son rôle dans la culture de l’Afrique de l’Ouest (elle est la fille du grand musicien Wasis Diop et la nièce du très important cinéaste Djibril Diop Mambetty), c’est aussi un retour aux sources.

Dans une démarche d’une intelligence et d’une puissance rares, le film mélange le documentaire très précisément travaillé et la fiction à la lisière du fantastique. Les statues qui vont revenir à Cotonou ont à l’origine une charge animiste et magique et, tandis que Mati Diop filme, au musée du Quai Branly, les préparatifs minutieux de l’expédition de si précieux objets, elle fait de l’un d’eux un personnage vivant qui raconte l’histoire de son peuple, de ses ancêtres, depuis l’obscurité des réserves du musée jusqu’à la lumière dans laquelle il sera exposé, à travers un texte rédigé avec l’écrivain haïtien Makenzy Orcel.
Mais ce qui est encore plus passionnant, c’est l’observation de l’arrivée de ces 26 statues à Cotonou. Transportées en convoi depuis l’aéroport, elles sont suivies par une foule impressionnante : cette ferveur populaire montre à quel point cette restitution est un événement historique et politique pour les Béninois. Un événement qui est l’occasion de débats enflammés entre étudiants dans l’amphithéâtre de l’université d’Abomey-Calavi. Certes les jeunes gens se réjouissent mais moult questions sont posées : pourquoi si tard ? Comment la conscience nationale s’est-elle construite en l’absence de l’histoire des royaumes pré-coloniaux ? 26 statues, n’est-ce pas une aumône au regard du pillage perpétré durant plusieurs décennies par l’État colonial français ? Mati Diop, grâce à la subtilité et à la profondeur de son récit, nous montre qu’à travers la réappropriation du passé culturel, se construit le futur de l’Afrique et de sa jeunesse.

En 2007 à Dakar, Nicolas Sarkozy, avec une impudence paternaliste typique de la plupart des dirigeants français, reprochait à l’homme africain de « n’être pas assez rentré dans l’histoire ». Grâce à Mati Diop, on ne peut que constater que les jeunes Béninois, riches d’une histoire centenaire, n’ont pas de leçons à recevoir de l’ex-colonisateur.